samedi 23 novembre 2013

"La vraie vie consiste à faire ce que vous aimez, en y impliquant tout votre être, pour qu’il n’y ait aucune contradiction interne, pas de guerre entre ce que vous faites et ce que vous croyez devoir faire."

Krishnamurti

dimanche 17 novembre 2013

LES CRAYONS DE COULEURS.

Ce sont des rires, que j'entends tout d'abord.
Des éclats de soleil sonores et percutants.
Elles arrivent, elles sont là, comme un vol d'étourneaux  prenant possession d'un ciel d'automne.
Elles courent, légères et gracieuses, aériennes, vers le dortoir pour chercher leurs crayons de couleurs.
Il faut faire vite, ne pas perdre de temps, ne pas laisser la vie s'échapper...jamais.
Toujours être prête, en première ligne...
Chacune se précipite sur son sac, dans un ballet  spontané et pourtant parfaitement chorégraphié...
Les mouvements se font subitement plus petits, plus précis, le temps de faire glisser une fermeture éclair, de saisir une trousse, une boîte et de repartir aussitôt dans un élan de vie impérieux, habillé de rires et de joie.
J'ai 8, 9 ans, le sentiment de faire partie d'un groupe, de vivre  "avec" d'être portée par une énergie commune et partagée, je me sens bien, je me sens "comme"...impatiente..
Je cours, je vole...je glisse...
Ma boîte de crayons de couleurs m'échappe des mains et tout son contenu se répand sur le sol, roule sous les lits, les armoires ...
Personne ne s'est arrêté, personne ne m'attend.
Je suis restée seule, agenouillée sur le sol, au milieu de toutes ces tâches de couleur éparses.
Les bruits de pas, les rires se sont éloignés jusqu'au silence.
Et j'ai pleuré.
Un chagrin de petite fille qui me tord le ventre encore aujourd'hui.
Un chagrin d'enfant solitaire, quelque soit le lieu,le moment, le décor, les personnages...
Seule, toujours...
C'était il y a 30 ans... C'était hier !!!
Quelques instants d'une vie, marqués au fer rouge dans la chair tendre des premiers souvenirs.
Pourquoi celui là plutôt qu'un autre, infiniment répété, à chaque nouvelle blessure, toujours présent ?
Peut être est il temps pour moi de consoler cette enfant. De l'aider à ramasser ses crayons,à se remettre debout.
De lui dire que le silence aussi est un cadeau. 
Que de se retrouver au sol parfois, permet d'élargir son champ de conscience, de s'échapper du mouvement, du bruit, de l'agitation, de se trouver SOI, indépendante et libre.
Les crayons roulaient sur le sol, s'appropriaient l'espace, allaient se nicher dans des coins sombres et inexplorés. Chaque crayon, chaque couleur, unique, indispensable...
Aujourd'hui je me sens enfin capable de revivre ce souvenir avec une émotion neuve.
De réaliser à quel point cette chute aurait pu me rendre libre. A quel point déjà  la vie m'invitait à trouver MA place, à me détacher de la masse, à prendre conscience de ce qui est réellement important; les couleurs, les couleurs roulant sur le sol, s'échappant de leur cage métallique et froide pour partir à l'assaut du lieu, à leur rythme et selon leur envie...dans une danse joyeuse...
Il faisait beau ce jour là, le soleil était éclatant, la pièce baignée de lumière et pour la première fois, je me souviens de la chaleur des rayons du soleil sur ma peau, au travers des baies vitrées.
Je crois qu'il est temps de ramasser tous ces crayons, un à un, bras tendu sous une armoire,de  glisser à plat ventre sous un lit, à droite, à gauche, devant, derrière, à côté d'un radiateur,de laisser ma main tatonner dans les plis d'un vêtement abandonné à même le sol...
Temps de mettre mon corps en mouvement autrement, au service de cet appel de la vie, à mon rythme et à ma façon avec cet amour du détail qui fait de moi celle que je suis...

taillure crayon

Temps de faire confiance à la vie...

OUI, décidément, il est temps de faire confiance à la Vie
La pièce est vide et froide.
Grande et lumineuse mais sans vie.
La vie est au delà...
Sur le sol, au centre de l'espace nu se trouve une pelote de laine, toute serrée, toute emberlificotée.
Je m'en approche doucement, à petits pas comptés:
1,2,3,
C'est comme si le temps n'existait plus.
4,5,6,
Comme si ma vie toute entière se concentrait dans mes pieds.
7,8,9,
Une marche lente, un balancier, un mouvement.
10,11,12,
Un point d'équilibre entre le sol et le vide.
13,14,15,
J'avance.
16,17,18,
J'ai peur,
19,20,21,
J'ai froid.
22,23,24,
Tout ce silence m'assourdi.
25,26,27,
Me déchire les entrailles
28,29,30,
Je me sens seule
31,32,33,
Comme jamais.
34,35,36,
Mes pieds se rejoignent enfin..côtes à côtes, immobiles.
37,38,39,
Je suis au bord du vide.
Je m'incline, saisi la pelote et m’assoie sur le plancher de bois vernis,  puis je fais glisser, rouler la petite boule d'une main à l'autre, du creux de ma paume vers le bout de mes doigts, du bout de mes doigts vers le creux de ma paume, créant un mouvement neuf et intemporel, hypnotique et infini pour emprisonner le temps.
J'ai la tête vide
Le cœur vide
Le corps déserté ;
La laine roule et roule encore et encore. Elle et un monde à elle toute seule.
De quoi sont  faites nos vies ?
De bruits?
De silences ?
De souvenirs ?
Et de pelotes de laine...
J'aimerai être capable d'en saisir une extrémité, de m'y agripper comme un appât à son hameçon, me laisser doucement glisser vers les profondeurs...
Je ferme les yeux...

mardi 5 novembre 2013

Quelle prétention d'avoir imaginé être capable d'écrire chaque jour...
Un jour sur deux...
Sur trois...
Une fois par semaine...
...
Pourtant les mots sont là, dans l'ordre, dans le désordre, au bord des lèvres, sur le bout de la langue, au fond du cœur, au bout des doigts, parfois même coincés en travers de la gorge...
Ils sont là, ils grouillent , ils circulent dans mon  sang, encre rouge, encre noire intimement mêlées...
Comment pourraient ils venir à me manquer alors qu'ils forment mon "tout" qu'ils me constituent .
A travers eux je prends ma place dans la grande histoire du monde... A travers eux j'existe...
J'aime les mots, leurs musiques, leur âme et leurs secrets, ce qu'ils montrent et ce qu'ils cachent.
J'aime les histoires, les petites, les grandes, celles qui font danser les émotions à travers le temps, à travers les âges.
En réalité, j'aime aimer...
Je crois que c'est aussi simple que cela.


Oui décidément, les choses les plus simples sont bien souvent aussi, les plus belles...